N’importe qui aurait baissé les yeux. Rentré la tête, aussi. Laissé doucement glisser la rencontre, filer un match de toute façon pas décisif. Parce qu’en face il y avait plus fort. Il y avait la bête. Rouge. Hurlante. Fumante. Pas agressive, non, juste mangeuse d’hommes, voilà. Les hockeyeurs américains, dimanche soir, se sont retrouvés dans le ventre d’un animal d’autant plus chauffé à blanc que la légende canadienne de cette discipline, Wayne Gretzki, était dans l’arène, acclamée à son arrivée comme l’auraient été Zidane et Dieu descendant en même temps sur la pelouse du Vélodrome. Les cris, les applaudissements continus, les pieds frappés en cadence sur le sol ; tout tremblait, comme si la terre elle-même se préoccupait du sort de cette partie. Les joueurs des Etats-Unis l’ont forcément senti, éprouvant dans leur chair la formidable rivalité opposant les Canadiens à leur pays. Ils n’ont pourtant pas tremblé, ne baissant ni la tête ni les yeux, s’imposant (5-3) même au terme d’un combat épique. C’est là l’impression très forte laissée par les athlètes américains, notamment depuis le début de ces Jeux. Ils ne doutent pas. Ils ont la conviction de ne pas être n’importe qui.